La Grande Fontaine de Loriol sur Drôme (suite)
Situation : Avenue de la république.
L’inventaire du patrimoine en donne la description suivante :
Fontaine dans le mur en talus au fond Est.
Avant-corps en pierre de taille. Décor d’ailes et d’une fleur de lys sculptées.
Portillon en fer. Grosse gargouille en pierre à la base.
Ecoulement dans une rigole au sol entre de belles dalles.
Grand lavoir. Un seul bac en pierre de taille.
Quatre départs de colonnes de pierre aux coins (supports d’une ancienne toiture?)
Toiture moderne avec piliers métalliques.
Histoire :
En 1786, Maître JOLI, avocat, écrit dans un mémoire pour Mme GRAVIER, propriétaire de l’auberge du Chariot d’Or (en procès au sujet de l’utilisation des eaux de la dite fontaine) : « Le bourg de Loriol est abreuvé de temps immémorial par une source unique et abondante ; elle est placée au devant du grand chemin de Loriol à Montélimar ; elle sort d’un terrain creusé par la nature ; la main des hommes y a réuni une voûte plus considérable, et l’eau qui en découle tombe d’abord dans un bassin qui forme la fontaine publique. De là, l’eau prend plusieurs directions que les besoins des habitants ont déterminés : au-dessous du bassin, elle forme un lavoir et, du lavoir, l’eau se prolonge dans un canal qui prend la direction du Nord et va joindre, à environ 80 toises de distance, le canal des moulins. Il part encore du bassin de la fontaine un petit canal qui porte l’eau parallèlement au lavoir, dans des auges destinées aux animaux. »
Si le terme « Grande Fontaine » est unanimement employé par les Loriolais c’est non seulement pour rendre compte de son débit important et pérenne mais aussi en raison des services éminents qu’elle a toujours rendus à la population. En effet, jusqu’à la première adduction d’eau qui n’interviendra qu’au milieu du XIXe siècle avec le captage de la source de St Pierre, les Loriolais qui vivent dans l’agglomération ne disposent que de l’eau de rares puits et de quelques citernes alimentées par les eaux de pluie et donc souvent taris les uns et les autres au cœur de l’été.
Bien sûr, la fontaine est située hors les murs et cela pose problème pendant les périodes troublées.
Ainsi, en 1570, pendant les guerres de religion, GORDES, lieutenant du roi à la tête des catholiques qui font le siège de Loriol tenu par les protestants, a l’idée d’obtenir leur reddition en asséchant la fontaine et des travaux de sape sont entrepris par ses troupes. In extremis, son plan est déjoué et il doit accepter une trêve.
Certains Loriolais attribuaient même aux eaux de la Grande Fontaine des vertus minérales et, bien après l’installation de fontaines publiques et même avec la distribution à domicile, il n’était pas rare de voir des habitants s’approvisionner à la Grande Fontaine pour leur eau potable.
Naturellement, le lavoir, constitué pendant longtemps par quelques grosses pierres, accueillit pendant des siècles les lavandières du village, en concurrence avec le canal des Moulins et le ruisseau de Vaucourte avant la construction des premiers lavoirs publics au XIXe siècles.
En 1843, au dire du Maire de l’époque, « la fontaine est dans un si grand délabrement et d’un si difficile accès qu’en hiver on ne peut puiser de l’eau qu’en s’exposant à tous les dangers d’une chute. Le lavoir, qui n’a pas de couverture, est un véritable cloaque. »
Il est demandé à M. JAVELAS, architecte, la création d’un lavoir recouvert de deux toitures avec un ciel-ouvert au milieu et un abreuvoir.
Le projet, légèrement modifié, sera réalisé en 1845 avec une seule toiture et une pierre monumentale devant la source.
Après la Seconde Guerre Mondiale, en 1947, le Conseil est avisé de ce que « les laveuses sont exposées à la pluie » et des travaux à la toiture sont confiés à M.MONTCHAL.
Au mois de juillet 1989, à l’occasion du bicentenaire du début de la Révolution, à la suite de l’intervention magique des services techniques et pendant quelques instants, la fontaine débitera du vin rouge et quelques bains, volontaires ou non, seront pris dans le lavoir.
En 2006, la margelle du bassin sera refaite ainsi que le dallage en pierre de taille.
En 2008 la structure métallique de la charpente sera repeinte en gris comme le reste du mobilier urbain.
De nos jours, si le lavoir est délaissé, la Grande Fontaine reste l’un des fleurons de notre patrimoine ; son bon entretien , son éclairage nocturne comme son fleurissement estival en font un pôle d’intérêt pour le visiteur.